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20042009
Tapoter sur son clavier, ce n’est pas militer !
Christian Bouchet Éditorial
Cédric Biagini dans le numéro d’avril du journal La Décroissance publie un intéressant article, intitulé Le web contre la politique ? qui contient cette amusante uchronie : « 18 juin 1940 - le général de Gaulle envoit un message sur Twitter et crée une cause sur Facebook. 19 juin 1940 - déjà plus de 30 millions d’internautes ont rejoint les rangs des “Français Libres” sur les réseaux sociaux. Les SMS et mails de soutien affluent. Des milliers de blogs fleurissent. Sur les forums, Gaullistes, FFI, FTP et Miliciens pétainistes s’écharpent. 18 juin 2009 - In Frankreich wird nur noch Deutsch gesprochen… »
Je venais à peine de le lire quand j’ai été sommé, par courriel, de rejoindre un groupe Facebook qui venait de se constituer en soutien au policier suspecté d'être à l'origine de la diffusion de la vidéo présentant l'agression d'un jeune Français par une bande de racailles dans un bus de nuit. Il y était précisé « Nous invitons tous ceux qui disposent d'un compte Facebook à rejoindre notre initiative, et à exiger avec nous l'arrêt immédiat des poursuites » Peu de temps après, un autre courriel m’informait, sur un ton triomphaliste, que 3000 personnes avaient rejoint ce groupe. 3000 ? Le nombre peut sembler élevé, mais il faut le mettre en rapport avec le nombre de Français inscrits sur Facebook soit près de 9 millions.
En clair, 0.033 % des membres de ce réseau social s’étaient mobilisés ce qui est … moins que rien et ce qui est très significatif de l’évolution d’un certain nombre de structures de la droite radicale. La réalité de l’action ne compte plus, l’important c’est le buzz… Dans les années 1960 on se moquait de la SFIO en disant : « une section socialiste, c’est un instituteur avec une ronéo », il se pourrait bien que l’on se moque demain du mouvement natio en écrivant « un groupe identitaire, c’est un graphomane avec une connections ADSL »…
Cédric Biagini pose très bien le problème : « Les militants passent un temps croissant vissés devant leur ordinateur à faire circuler des informations et à s’écharper sur les forums avec une violence que l’absence de liens véritables permet. Une information chasse l’autre dans un ballet sans fin qui donne le tournis… et de nouvelles raisons de s’inquiéter et de s’indigner. Plus le temps de prendre du recul pour mettre en perspective, de conceptualiser ou de débattre. Il faut se connecter aux évènements les plus récents et rester vigilants pour être sûrs de ne rien manquer ! Cette dictature de l’instant empêche de chercher des réponses philosophiques et politiques. (…) Cette obsession de l’information postule qu’il suffirait d’être au courant des horreurs du monde pour les combattre. Ce peut être une condition nécessaire mais jamais suffisante, et il n’y a pas de lien direct entre information et action – si l’on entend bien sûr par « action » actes et engagement, et non un simple réflexe émotionnel ou compassionnel. »
Puis il enfonce le clou : « Le rapport de force politique ne se crée pas devant un écran. Car scoops et révélations n’entraînement pas mobilisations. Car ces informations et cette masse de connaissances accessibles, aussi critiques soient-elles, si elles n’entrent pas dans la « réalité de nos situations », c’est-à-dire dans un ordre constitué de croyances, de valeurs, de repères et de pratiques, ne produisent aucune puissance politique. Or la société communicationnelle nous condamne à n’être que des émetteurs-récepteurs d’informations, perpétuellement plongés dans l’univers des machines, extérieurs au monde. »
Bien évidemment, il ne s’agit pas, ni dans l’esprit de Cédric Biagini ni dans le mien, de refuser toute forme de communication et d’échanges d’informations. Mais sans analyses et réflexions celles-ci sont vaines, voire nuisible car aboutissant à un engagement émotionnel/réactionnel et non plus idéologique.
D’où l’importance d’une presse écrite d’information et d’analyse (c'est la raison pour laquelle notre équipe publie toujours le mensuel Résistance et la revue Eurasia et participe à la rédaction du bimensuel Flash); d’où l’importance de sites internet de référence qui, comme voxnr, donnent, non pas de l'information brute et éphémère mais des matériaux pour réfléchir; d’où l’importance aussi de rester modeste et véritablement militant, sur le terrain le tract ou le pot de colle à la main et non pas devant un écran…
http://www.voxnr.com/cc/a_la_une/EkFAZlVEpViXghlzOj.shtml
Cédric Biagini dans le numéro d’avril du journal La Décroissance publie un intéressant article, intitulé Le web contre la politique ? qui contient cette amusante uchronie : « 18 juin 1940 - le général de Gaulle envoit un message sur Twitter et crée une cause sur Facebook. 19 juin 1940 - déjà plus de 30 millions d’internautes ont rejoint les rangs des “Français Libres” sur les réseaux sociaux. Les SMS et mails de soutien affluent. Des milliers de blogs fleurissent. Sur les forums, Gaullistes, FFI, FTP et Miliciens pétainistes s’écharpent. 18 juin 2009 - In Frankreich wird nur noch Deutsch gesprochen… »
Je venais à peine de le lire quand j’ai été sommé, par courriel, de rejoindre un groupe Facebook qui venait de se constituer en soutien au policier suspecté d'être à l'origine de la diffusion de la vidéo présentant l'agression d'un jeune Français par une bande de racailles dans un bus de nuit. Il y était précisé « Nous invitons tous ceux qui disposent d'un compte Facebook à rejoindre notre initiative, et à exiger avec nous l'arrêt immédiat des poursuites » Peu de temps après, un autre courriel m’informait, sur un ton triomphaliste, que 3000 personnes avaient rejoint ce groupe. 3000 ? Le nombre peut sembler élevé, mais il faut le mettre en rapport avec le nombre de Français inscrits sur Facebook soit près de 9 millions.
En clair, 0.033 % des membres de ce réseau social s’étaient mobilisés ce qui est … moins que rien et ce qui est très significatif de l’évolution d’un certain nombre de structures de la droite radicale. La réalité de l’action ne compte plus, l’important c’est le buzz… Dans les années 1960 on se moquait de la SFIO en disant : « une section socialiste, c’est un instituteur avec une ronéo », il se pourrait bien que l’on se moque demain du mouvement natio en écrivant « un groupe identitaire, c’est un graphomane avec une connections ADSL »…
Cédric Biagini pose très bien le problème : « Les militants passent un temps croissant vissés devant leur ordinateur à faire circuler des informations et à s’écharper sur les forums avec une violence que l’absence de liens véritables permet. Une information chasse l’autre dans un ballet sans fin qui donne le tournis… et de nouvelles raisons de s’inquiéter et de s’indigner. Plus le temps de prendre du recul pour mettre en perspective, de conceptualiser ou de débattre. Il faut se connecter aux évènements les plus récents et rester vigilants pour être sûrs de ne rien manquer ! Cette dictature de l’instant empêche de chercher des réponses philosophiques et politiques. (…) Cette obsession de l’information postule qu’il suffirait d’être au courant des horreurs du monde pour les combattre. Ce peut être une condition nécessaire mais jamais suffisante, et il n’y a pas de lien direct entre information et action – si l’on entend bien sûr par « action » actes et engagement, et non un simple réflexe émotionnel ou compassionnel. »
Puis il enfonce le clou : « Le rapport de force politique ne se crée pas devant un écran. Car scoops et révélations n’entraînement pas mobilisations. Car ces informations et cette masse de connaissances accessibles, aussi critiques soient-elles, si elles n’entrent pas dans la « réalité de nos situations », c’est-à-dire dans un ordre constitué de croyances, de valeurs, de repères et de pratiques, ne produisent aucune puissance politique. Or la société communicationnelle nous condamne à n’être que des émetteurs-récepteurs d’informations, perpétuellement plongés dans l’univers des machines, extérieurs au monde. »
Bien évidemment, il ne s’agit pas, ni dans l’esprit de Cédric Biagini ni dans le mien, de refuser toute forme de communication et d’échanges d’informations. Mais sans analyses et réflexions celles-ci sont vaines, voire nuisible car aboutissant à un engagement émotionnel/réactionnel et non plus idéologique.
D’où l’importance d’une presse écrite d’information et d’analyse (c'est la raison pour laquelle notre équipe publie toujours le mensuel Résistance et la revue Eurasia et participe à la rédaction du bimensuel Flash); d’où l’importance de sites internet de référence qui, comme voxnr, donnent, non pas de l'information brute et éphémère mais des matériaux pour réfléchir; d’où l’importance aussi de rester modeste et véritablement militant, sur le terrain le tract ou le pot de colle à la main et non pas devant un écran…
http://www.voxnr.com/cc/a_la_une/EkFAZlVEpViXghlzOj.shtml
brusyl- Admin
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Tapoter sur son clavier, ce n’est pas militer ! :: Commentaires
Lun 20 Avr 2009 - 17:03 par Mister Cyril
Bon je dois partir à la cambrousse une dernière pique pour vous 2 avant de décoller, qui a dit ?
"On peut poser qu'il y a équivalence complète entre le Chrétien et l'Anarchiste: ils n'ont d'autre but, d'autre instinct que la destruction."
Ca s'appelle faire d'une pierre...
:12063:
"On peut poser qu'il y a équivalence complète entre le Chrétien et l'Anarchiste: ils n'ont d'autre but, d'autre instinct que la destruction."
Ca s'appelle faire d'une pierre...
:12063:
Lun 20 Avr 2009 - 16:48 par Mister Cyril
Un de tes auteurs préférés a écrit
"La manie cartésienne de morceler et de progresser par degrés garantit toujours l'inaccompli et le boiteux. Les armées de l'ordre ne recrutent que des mutilés."
En clair pour moi il est inutile d'opposer le militantisme à la papa (et je revendique même le terme) et l'intellectualisme virtuel "incapacité à se servir de son entendement", certes, mais va expliquer cela à la ménagère de moins de 50 ans qui une fois son morne quotidien terminé et qui se jette sur son Gala ou Turf Magazine qu'elle manque de courage...
et pourtant on peut être prolo et posséder une trame IDEOLOGIQUE, simple, épurée de grandiloquence mais avant de l'amener sur nos blogs avant-gardistes ou la lecture d'un Vaneigem ou Chomsky elle est souvent passée par la case stand merguez à la fête de l'Huma et collage de tronbines sur les murs de la cité...et ce militantisme là n'est pas plu méprisable que Jean Paul trônant sur son bidon devant les prolos de Renault pour leur expliquer (dans un silence assourdissant) que les mondes intellos et ouvriers ne font qu'un...bein non camarade;..peut être qu'ils n'ont pas le courage d'entendre ou peut être que l'on nie leur véritable substance!
Les débats théoriques à 4 où l'on finit toujours par s'engueuler -et c'est naturel on va accentuer les désaccords- sont souvent mis de côté dans l'action militante basique et manuelle; "la gauche à 2 c'est une tendance, à 3 c'est le scission" dit la chanson...alors du global (et donc de la capacité à accepter les pratriques politiques de l'autre) car les armées de l'ordre ont beaucoup moins d'état d'âme et des millions de mutilés à recruter si besoin...
"La manie cartésienne de morceler et de progresser par degrés garantit toujours l'inaccompli et le boiteux. Les armées de l'ordre ne recrutent que des mutilés."
En clair pour moi il est inutile d'opposer le militantisme à la papa (et je revendique même le terme) et l'intellectualisme virtuel "incapacité à se servir de son entendement", certes, mais va expliquer cela à la ménagère de moins de 50 ans qui une fois son morne quotidien terminé et qui se jette sur son Gala ou Turf Magazine qu'elle manque de courage...
et pourtant on peut être prolo et posséder une trame IDEOLOGIQUE, simple, épurée de grandiloquence mais avant de l'amener sur nos blogs avant-gardistes ou la lecture d'un Vaneigem ou Chomsky elle est souvent passée par la case stand merguez à la fête de l'Huma et collage de tronbines sur les murs de la cité...et ce militantisme là n'est pas plu méprisable que Jean Paul trônant sur son bidon devant les prolos de Renault pour leur expliquer (dans un silence assourdissant) que les mondes intellos et ouvriers ne font qu'un...bein non camarade;..peut être qu'ils n'ont pas le courage d'entendre ou peut être que l'on nie leur véritable substance!
Les débats théoriques à 4 où l'on finit toujours par s'engueuler -et c'est naturel on va accentuer les désaccords- sont souvent mis de côté dans l'action militante basique et manuelle; "la gauche à 2 c'est une tendance, à 3 c'est le scission" dit la chanson...alors du global (et donc de la capacité à accepter les pratriques politiques de l'autre) car les armées de l'ordre ont beaucoup moins d'état d'âme et des millions de mutilés à recruter si besoin...
Lun 20 Avr 2009 - 14:22 par country skinner
Le parlementarisme (démocratie représentative), c'est une forme de représentation par abandon du pouvoir électif individuel (mandat irrévocable), ca n'a rien à voir avec le fait de vouloir gouverner ou pas. Sauf que si on s'en remet (mandat irrévocable) à ceux qui sont élus ainsi pour modifier à posteriori la règle élective, on n'en sort pas... D'où l'intérêt d'une rupture "révolutionnaire" (Nous ne voulons pas changer les règles du jeu mais changer le jeu - A.Breton)t'as qu'à militer pour une prise du pouvoir par les élections parlementaristes
Bein trop con, j'ai toujours pas compris, je vais même participer activement au défilé très traditionnel et très prolo-folklho du 1er mai... dernier détail perdre du temps, parfois, mais me faire avoir, certainement pas j'ai rencontré des gars formidables dans ce militantisme de base (pléonasme)...et je développerai même pas ce dernier point!
L'un n'empêche pas l'autre mon pote : Moi aussi je vais participer à la manifestation folklorique du 1er Mai, et moi aussi je connais des gars formidables parmi les militants de base... Sans doute les mêmes qui se plaignent en permanence de n'être ni assez entendus ni assez représentés par leurs instances dirigeantes...
"Qu’est-ce que les Lumières ? La sortie de l’homme de sa minorité. Entendre ce terme au sens d’être incapable de penser par soi-même dont il est lui-même responsable. Minorité, c’est-à-dire incapacité de se servir de son entendement (pouvoir de penser) sans la direction d’autrui, minorité dont il est lui-même responsable (faute) puisque la cause en réside non dans un défaut de l’entendement mais dans un manque de décision et de courage de s’en servir sans la direction d’autrui. Sapere aude ! (Ose penser) Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières"
Ah oui, je sais, en 68 déjà j'entendais répondre : Tu favorises la division... Marx merci, en évitant la division, les Chereque Thibault et consorts sont toujours aux commandes...
Lun 20 Avr 2009 - 14:08 par Mister Cyril
Un dernier mot j'emmerde les dirigeants syndicaux et Thibault le premier (je parle même pas de Chérèque bien sûr) mais les petits scribouillards néo-libertaires ou rouges écarlates qui dénoncent les pisse-froid des directions syndicales sur leurs petits blogs familiaux ne connaissent rien au mouvement social; c'est vraiment le thème de la journée, je suis derrière mon clavier mais je vais vous expliquer comment on forme, dirige un mouvement social de plusieurs millions de personnes;..hasta la victoria internet...bientôt sur PSP un jeu de simulation "Révolution 2012" où comment renverser le Grand Capital en quelques clics!!!
Lun 20 Avr 2009 - 13:58 par Mister Cyril
"n'a plus la faveur des engagés (sauf dans les partis marginaux non parlementaristes). "
Bein t'as qu'à militer pour une prise du pouvoir par les élections parlementaristes alors...
""Le militantisme de base ou l'art de se faire avoir", c'était un thème situ des années 68... Putain, quarante ans et deux générations pour arriver à comprendre..."
Bein trop con, j'ai toujours pas compris, je vais même participer activement au défilé très traditionnel et très prolo-folklho du 1er mai...
dernier détail perdre du temps, parfois, mais me faire avoir, certainement pas j'ai rencontré des gars formidables dans ce militantisme de base (pléonasme)...et je développerai même pas ce dernier point! :23467:
Bein t'as qu'à militer pour une prise du pouvoir par les élections parlementaristes alors...
""Le militantisme de base ou l'art de se faire avoir", c'était un thème situ des années 68... Putain, quarante ans et deux générations pour arriver à comprendre..."
Bein trop con, j'ai toujours pas compris, je vais même participer activement au défilé très traditionnel et très prolo-folklho du 1er mai...
dernier détail perdre du temps, parfois, mais me faire avoir, certainement pas j'ai rencontré des gars formidables dans ce militantisme de base (pléonasme)...et je développerai même pas ce dernier point! :23467:
Lun 20 Avr 2009 - 13:57 par country skinner
http://cequilfautdetruire.org/spip.php?article1976
Hal-lu-ci-nant ! Le 1er mai, jour de la Fête du travail, les syndicats appellent à manifester. L’événement est de taille. Pour rendre compréhensible le choc de cette effarante décision, les médias ont fait dans la pédagogie en notant qu’au grand jamais les syndicats n’avaient défilé « tous ensemble, tous ensemble » en ce jour de célébration de l’abomination salariale. Raison d’une telle audace : « poursuivre le mouvement social ». Après les défilés massifs du 29 janvier, puis ceux du 19mars, les syndicats, encore émoustillés par des succès aussi décisifs, ont donc courageusement décidé d’engager la poursuite, d’un pas de sénateur : on sort les drapeaux, les fanions et la sono tous les quarante jours. « Maintenir la pression » disent les chefs syndicaux. « Faire du mois d’avril un mois de mobilisations ponctué d’initiatives visant à soutenir les actions engagées et à organiser les solidarités », osent-ils à la sortie d’un apéro avec Sarkozy, le 30 mars. D’autant que 60 % du cheptel à statistiques s’est déclaré « favorable à la poursuite du mouvement ».
Mais qu’est-ce donc que ce fameux mouvement social ? Une nouvelle chapelle politique distillant ses promesses à la valetaille dont il est exigé dignité, patience et sens des responsabilités, comme s’il se fût agi d’électeurs ?
Une espèce de bibelot trônant sur la cheminée, dont on ne cesse de vanter les vertus pour mieux l’ignorer ? À croire qu’il est tellement partout qu’il n’est finalement nulle part. Dans une chorégraphie obligée, la gauche se montre, mais de loin, un peu compréhensive à l’égard des énervés ; le porte-parole de l’UMP, Frédéric Lefebvre, affirme que « le durcissement des conflits n’est pas acceptable mais s’explique par des raisons objectives » ; les syndicats « comprennent » la colère. Mais quand des salariés séquestrent leur patron, rien ! Tandis qu’un haut responsable de la majorité confie : « Il faut avoir une marge de tolérance à l’égard de ces comportements extrêmes… » tout en lâchant CRS et BAC sur les protestataires, comme à Paris, Lyon ou Besançon, et la brigade criminelle contre les grévistes de Gaz de France… [1]
Une vraie prouesse. Réussir à faire du « mouvement social » une entrave… au mouvement social. Comme les marchands qui présentent leur camelote chargée d’authenticité : vin, pain, vie, amour, nature… copies-standard du vrai, destinées à effacer la mémoire même de l’original. Travail de faussaires.Vendre l’ombre pour la proie. Distribuer un hochet pour calmer les petits. Jusqu’à ce que, dans une Sainte-Alliance, bureaucrates et politicards tombent les masques de la compréhension et de la compassion pour s’affirmer ennemis de tout mouvement dès qu’il se montre véritablement social, c’est-à-dire questionnant la société et son organisation. Ce sont alors vitupérations contre les « éléments incontrôlés » et les « provocateurs » et appels à des « peines sévères », à « l’application rigoureuse de loi », à une répression exemplaire, à une extrême sévérité, comme on a pu le voir, entre autres, à Strasbourg début avril, où quelques centaines de jeunes décidés à marquer le coup de leur colère ont tenté de se jouer de 25 000 flics quadrillant une ville-bunker. Et autrement qu’en polémiquant sur le nombre de manifestants.
Article publié dans CQFD n°66, avril 2009, actuellement en kiosque.
[1] Suite à des coupures menées le 2 avril, dans Paris, par des salariés de GDF qui réclament des hausses de salaires.
Hal-lu-ci-nant ! Le 1er mai, jour de la Fête du travail, les syndicats appellent à manifester. L’événement est de taille. Pour rendre compréhensible le choc de cette effarante décision, les médias ont fait dans la pédagogie en notant qu’au grand jamais les syndicats n’avaient défilé « tous ensemble, tous ensemble » en ce jour de célébration de l’abomination salariale. Raison d’une telle audace : « poursuivre le mouvement social ». Après les défilés massifs du 29 janvier, puis ceux du 19mars, les syndicats, encore émoustillés par des succès aussi décisifs, ont donc courageusement décidé d’engager la poursuite, d’un pas de sénateur : on sort les drapeaux, les fanions et la sono tous les quarante jours. « Maintenir la pression » disent les chefs syndicaux. « Faire du mois d’avril un mois de mobilisations ponctué d’initiatives visant à soutenir les actions engagées et à organiser les solidarités », osent-ils à la sortie d’un apéro avec Sarkozy, le 30 mars. D’autant que 60 % du cheptel à statistiques s’est déclaré « favorable à la poursuite du mouvement ».
Mais qu’est-ce donc que ce fameux mouvement social ? Une nouvelle chapelle politique distillant ses promesses à la valetaille dont il est exigé dignité, patience et sens des responsabilités, comme s’il se fût agi d’électeurs ?
Une espèce de bibelot trônant sur la cheminée, dont on ne cesse de vanter les vertus pour mieux l’ignorer ? À croire qu’il est tellement partout qu’il n’est finalement nulle part. Dans une chorégraphie obligée, la gauche se montre, mais de loin, un peu compréhensive à l’égard des énervés ; le porte-parole de l’UMP, Frédéric Lefebvre, affirme que « le durcissement des conflits n’est pas acceptable mais s’explique par des raisons objectives » ; les syndicats « comprennent » la colère. Mais quand des salariés séquestrent leur patron, rien ! Tandis qu’un haut responsable de la majorité confie : « Il faut avoir une marge de tolérance à l’égard de ces comportements extrêmes… » tout en lâchant CRS et BAC sur les protestataires, comme à Paris, Lyon ou Besançon, et la brigade criminelle contre les grévistes de Gaz de France… [1]
Une vraie prouesse. Réussir à faire du « mouvement social » une entrave… au mouvement social. Comme les marchands qui présentent leur camelote chargée d’authenticité : vin, pain, vie, amour, nature… copies-standard du vrai, destinées à effacer la mémoire même de l’original. Travail de faussaires.Vendre l’ombre pour la proie. Distribuer un hochet pour calmer les petits. Jusqu’à ce que, dans une Sainte-Alliance, bureaucrates et politicards tombent les masques de la compréhension et de la compassion pour s’affirmer ennemis de tout mouvement dès qu’il se montre véritablement social, c’est-à-dire questionnant la société et son organisation. Ce sont alors vitupérations contre les « éléments incontrôlés » et les « provocateurs » et appels à des « peines sévères », à « l’application rigoureuse de loi », à une répression exemplaire, à une extrême sévérité, comme on a pu le voir, entre autres, à Strasbourg début avril, où quelques centaines de jeunes décidés à marquer le coup de leur colère ont tenté de se jouer de 25 000 flics quadrillant une ville-bunker. Et autrement qu’en polémiquant sur le nombre de manifestants.
Article publié dans CQFD n°66, avril 2009, actuellement en kiosque.
[1] Suite à des coupures menées le 2 avril, dans Paris, par des salariés de GDF qui réclament des hausses de salaires.
Lun 20 Avr 2009 - 13:38 par country skinner
Vous remarquerez tous au passage qu'après avoir discuté de la réflexion et de l'action, et de l'information qui tue la réflexion (ou qui la nourrit après digestion, ce n'est peut être qu'un problème de temporalité) personne n'a plus envie de se poser la seule question qui est en filigrane dans cet article qui se veut mobilisateur : Pourquoi l'action militante partisane (comme la décrit joyeusement Mister) n'a plus la faveur des engagés (sauf dans les partis marginaux non parlementaristes).
"Le militantisme de base ou l'art de se faire avoir", c'était un thème situ des années 68... Putain, quarante ans et deux générations pour arriver à comprendre...
"Le militantisme de base ou l'art de se faire avoir", c'était un thème situ des années 68... Putain, quarante ans et deux générations pour arriver à comprendre...
Lun 20 Avr 2009 - 13:29 par Mister Cyril
"amusant comme chacun voit midi à sa porte....
Mister voit un appel au rassemblement partisan....
moi j'avais lu autre chose dans cet article : le trop d'information est un danger pour la réflexion...."
Marrant effectivement les interprétations que l'on fait avec cet outil sans se connaître (physiquement), on a une image mentale vraiment déformante (je n'ai pas la prétention d'être différent).
On en avait déjà parlé une fois sur le chat Bru...là tu fais abstraction de mes 2 premières lignes où j'exprime - comme toi-avec mes mots que trop d'info nuit à la réflexion (c'est une évidence) ...en me classant dans le "rassemblement partisan "(il manque juste le qualificatif "rouge")!
Non, non on est d'accord sur le fond et certains soirs après 2 heures de "surf" et 50 sites visités, je ressents souvent une insatisfaction, un manque de toujours plus d'infos (comme si j'avais raté l'info qui allais changer ma vie) et en même temps une overdose de faits qui entretient le doute et la résignation...
C'est pour cela que le bon vieux militantisme à la papa, réunion à 20 autour d'un sandwich au pâté et un mauvais rouge, tractage de 40 feuilles en 1 heure qui ne seront même pas lu, discussion virile avec des adversaires -voire des ennemis politiques-...ça reste un volet du militantisme indispensable quand on veut toucher toutes les couches de la société et surtout celles que l'on ne fréquente pas dans son quotidien...ce qui ne m'empêche pas -tant bien que mal- d'essayer les technologies "modernes", quitte à me faire traiter de quiche!
Allez salut les zigotos mon ventre crie famine!
Mister voit un appel au rassemblement partisan....
moi j'avais lu autre chose dans cet article : le trop d'information est un danger pour la réflexion...."
Marrant effectivement les interprétations que l'on fait avec cet outil sans se connaître (physiquement), on a une image mentale vraiment déformante (je n'ai pas la prétention d'être différent).
On en avait déjà parlé une fois sur le chat Bru...là tu fais abstraction de mes 2 premières lignes où j'exprime - comme toi-avec mes mots que trop d'info nuit à la réflexion (c'est une évidence) ...en me classant dans le "rassemblement partisan "(il manque juste le qualificatif "rouge")!
Non, non on est d'accord sur le fond et certains soirs après 2 heures de "surf" et 50 sites visités, je ressents souvent une insatisfaction, un manque de toujours plus d'infos (comme si j'avais raté l'info qui allais changer ma vie) et en même temps une overdose de faits qui entretient le doute et la résignation...
C'est pour cela que le bon vieux militantisme à la papa, réunion à 20 autour d'un sandwich au pâté et un mauvais rouge, tractage de 40 feuilles en 1 heure qui ne seront même pas lu, discussion virile avec des adversaires -voire des ennemis politiques-...ça reste un volet du militantisme indispensable quand on veut toucher toutes les couches de la société et surtout celles que l'on ne fréquente pas dans son quotidien...ce qui ne m'empêche pas -tant bien que mal- d'essayer les technologies "modernes", quitte à me faire traiter de quiche!
Allez salut les zigotos mon ventre crie famine!
Lun 20 Avr 2009 - 13:12 par brusyl
amusant comme chacun voit midi à sa porte....
Mister voit un appel au rassemblement partisan....
moi j'avais lu autre chose dans cet article : le trop d'information est un danger pour la réflexion....
Quoi que t'en dises, country, il y a là une vérité (que d'ailleurs a fort bien intégré sarkozy car il en a fait la base de sa communication ) ... Heureux et privilégié sois-tu d'échapper à ce piège tu es suffisamment armé intellectuellement pour ce faire, mais quid des autres ?
Le facteur "temps", temps de l'intériorisation, temps de la réflexion, temps de la décision, m'est indispensable....
Mister voit un appel au rassemblement partisan....
moi j'avais lu autre chose dans cet article : le trop d'information est un danger pour la réflexion....
Quoi que t'en dises, country, il y a là une vérité (que d'ailleurs a fort bien intégré sarkozy car il en a fait la base de sa communication ) ... Heureux et privilégié sois-tu d'échapper à ce piège tu es suffisamment armé intellectuellement pour ce faire, mais quid des autres ?
Le facteur "temps", temps de l'intériorisation, temps de la réflexion, temps de la décision, m'est indispensable....
Lun 20 Avr 2009 - 12:55 par Mister Cyril
Le meilleur article du semestre...encore une fois un article que j'aurais aimé écrire...on se noie dans l'information, toujours à la recherche du scoop et en instantanné s'il vous plaît (moi le premier) mais tout se dilue inexorablement faute de relais "physique"!
Exceptionnel outil de communication internet, irremplaçable...mais c'est aussi un acide violent de "balkanisation" des luttes!
Exceptionnel outil de communication internet, irremplaçable...mais c'est aussi un acide violent de "balkanisation" des luttes!
Lun 20 Avr 2009 - 12:53 par country skinner
Dans cette analyse, il y a un petit problème de décalage de parallaxe : Le problème posé devrait être celui de la mobilisation de l'activisme politique et ses moyens, et non un imaginaire effet démobilisateur du net. On pourrait poser l'analyse autrement : Aujourd'hui, les citoyens sont incommensurablement plus informés par le net que par l'action militante traditionnelle (le net équivant à combien de divisions sur le terrain de militants "le tract ou le pot de colle à la main" ? ). Ce qui pose question, c'est la capacité des partis politiques traditionnels à mobiliser du militant pour des actions... égoisme frileux des nouvelles générations, ou désenchantement politique au vu du comportement autiste des partis politiques traditionnels ? Personnellement, je ne me vois plus tracter comme autrefois pour un parti comme l'est le PS aujourd'hui... Mais le NPA aurait il eu le même démarrage et la même audience à coup de mlilitants tractant sur les marchés ? J'en suis pas sur... Quand à la mouvance autonome, elle n'organise son action sur le terrain aujourd'hui essentiellement grace à une coordination par les outils du web...
L'autre point serait que débordés par la recherche de l'information permanente, nous n'aurions plus le recul nécessaire pour réfléchir. Sont bien urbains et prévenants ces gars là de s'inquiéter de mon manque de temps pour réfléchir, il ne manquerait plus qu'ils proposent de le faire à ma place, pour que je détecte comme le fumet peu ragoutant des politiciens parlementaristes affolés devant leur perte de crédibilité... "D’où l’importance d’une presse écrite d’information et d’analyse" ... pile dans le mille Emile... avec les meilleurs d'entre nous (et journalistes de préférence ?) pour nous éviter de nous disperser et nous montrer du doigt ce qui est important...
"Dès que quelqu'un me parle d'élites, je sais que je me trouve en présence d'un crétin." Cioran
Dernière édition par country skinner le Lun 20 Avr 2009 - 12:59, édité 1 fois
L'autre point serait que débordés par la recherche de l'information permanente, nous n'aurions plus le recul nécessaire pour réfléchir. Sont bien urbains et prévenants ces gars là de s'inquiéter de mon manque de temps pour réfléchir, il ne manquerait plus qu'ils proposent de le faire à ma place, pour que je détecte comme le fumet peu ragoutant des politiciens parlementaristes affolés devant leur perte de crédibilité... "D’où l’importance d’une presse écrite d’information et d’analyse" ... pile dans le mille Emile... avec les meilleurs d'entre nous (et journalistes de préférence ?) pour nous éviter de nous disperser et nous montrer du doigt ce qui est important...
"Dès que quelqu'un me parle d'élites, je sais que je me trouve en présence d'un crétin." Cioran
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