cybermaquis
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.
Le Deal du moment : -21%
LEGO® Icons 10329 Les Plantes Miniatures, ...
Voir le deal
39.59 €

Désobéir à l'argent

Aller en bas

18072011

Message 

Désobéir à l'argent Empty Désobéir à l'argent





« Désobéir à l’argent », par Les Désobéissants, Le passager Clandestin, février 2011.


Avant de désobéir à l’argent, il faut dépenser 5 euros ; mais avouez que ce n’est pas grand-chose pour un livre. Ce livre s’ouvre sur une citation de Maurice Allais, prix Nobel d’économie, qui dit à peu près ceci : il n’y pas de différence entre la création de monnaie ex nihilo par le système bancaire et les faux-monnayeurs. Le ton est donné.

Les auteurs sont désobéissants, et ne mettent pas leur nom propre en avant. Les désobéissants sont un collectif activiste qui forme à la désobéissance civile. Vous trouverez d’ailleurs, dans cette même édition du passager clandestin, le fameux livre de Thoreau sur La désobéissance civile. Désobéir est une collection qui comporte désormais une dizaine de titres : désobéir pour le logement, désobéir à la pub, désobéir dans l’entreprise, etc. Ici donc, il s’agit de désobéir à l’argent. Il faut d’abord louer la volonté pédagogique de la collection ; c’est une pédagogie mise au service d’un combat, d’un agir.

D’abord, les auteurs rappellent des chiffres qu’on aime à oublier : sur les inégalités mondiales de plus en plus criantes, sur les conséquences dramatiques des crises financières, sur le gouffre entre les marchés financiers et la production effective de biens et services ; etc. Tout cela est bien connu, mais de ce genre de connaissance qui n’engage à rien. Or, le propos est d’engager. Le premier sens du mot « crédit » est celui de confiance, aujourd’hui, il est devenu synonyme de défiance, de discrédit, de désengagement. Aujourd’hui où les derniers espaces de gratuité sont désormais soumis au marché, y compris l’école, aujourd’hui où tout à un prix, y compris les organes humains, il s’agit pour les auteurs de montrer que tout n’est pas perdu. « Nouveau mode de calcul de la richesse, renationalisation de la création monétaire, taxation des mouvements de capitaux, captation des intérêts issus de la création monétaire par le Trésor public pour financer les investissements collectifs et la protection sociale, définition d’un revenu maximal ; monnaies solidaires, troc, abolition de la monnaie, les chemins du changement sont multiples et méritent d’être discutés voire débattus » p. 14.

Les auteurs retracent une petite histoire de la désobéissance à l’argent : on y retrouve par exemple Lucio Urtubia Jiménez, militant anarchiste espagnol qui fabriqua de la fausse monnaie avec des objectifs de résistance ou bien Pëter Tabubinger, banquier allemand et Robin des bois moderne, qui volait aux riches pour donner aux pauvres. On y retrouve les expériences historiques de monnaies alternatives ou de remplacement, comme ces expérimentations allemandes, autrichiennes ou françaises autour de la « monnaie fondante ». On y retrouve des approches bancaires et financières différentes, tel ce projet, mené entre autres par Pierre Leroux et Pierre-Joseph Proudhon, pour mettre en place une « Banque du peuple ». Il est question aussi des communautés de vie et de travail qui s’affranchissent de l’argent, ce qui nous mène de Robert Owen, au kibboutz, aux communautés Emmaüs. Il est question enfin de l’approche « distributive » . L’économie distributive se résument en trois points : « 1) Chiffrer monétairement l’ensemble des biens et services produits pendant une certaine période ; 2) Emettre la monnaie correspondante ; 3) La distribuer aux usagers. Cette monnaie est émise sans intérêt. Elle s’annule au moment de la transaction. On ne peut l’accumuler. Il lui manque donc un des trois caractères reconnus aux monnaies. Elle est, soulignons-le, anticapitaliste par construction » (p. 32).

Comment donc résister à la monnaie ? En se mettant au SEL (Système d’Echange Local) ? En désobéissant aux droits sur les œuvres et en soutenant les creative commons ? En organisant des clubs de troc comme en Amérique latine ? En soutenant le projet de monnaie solidaire SOL, porté par Patrick Viveret, qui s’inspire notamment des expériences de monnaies locales d’Amérique latine ? Le principal mérite de ce livre est ainsi de nous indiquer qu’il existe des solutions alternatives dont on ne parle pas tant que ça. Connaissez-vous, en effet, Marinaleda, ville de 2700 habitants et commune autogestionaire d’Espagne, qui ne fut pas touché par la crise ? Connaissez-vous la Fédération européenne des banques éthiques alternatives (Febea) ? Mais, indiquer n’est pas analyser, et le livre a peut-être le défaut de masquer les difficultés, ne serait-ce que parce qu’il ne distingue pas assez monnaie et argent, ou parce qu’il pense le local en dépit du global. Une chose demeure certaine : désobéir à l’argent demande de comprendre ce qu’est l’argent et de critiquer notre propre rapport à l’argent, cela demande donc un effort d’intelligence et d’inventivité, qui pour, cette raison même, est louable.
http://www.marianne2.fr/philippepetit/Desobeir-a-l-argent_a201.html?com#
brusyl
brusyl
Admin

Nombre de messages : 3110
Date d'inscription : 17/07/2008

Revenir en haut Aller en bas

Partager cet article sur : reddit

Désobéir à l'argent :: Commentaires

Donald11

Message Ven 22 Juil 2011 - 15:07 par Donald11

Il me semble qu'on omet une donnée fondamentale : les besoins propres aux humains pour survivre, a savoir manger boire et respirer. Et la, Monsanto a tout compris.
D'un autre cote, a quoi bon nourrir des bouches inutiles ? Un milliard de crève-la-faim, et aucun projet pour endiguer cet état, bien au contraire. Rien qu''en France, le nombre de pauvres est en train d'exploser dans une indifférence inhumaine. Nos seigneurs pointent même la misère du doigt, en accusant les pauvres de le faire exprès, et ça fonctionne.
Je ne me sens pas très optimiste ...

Revenir en haut Aller en bas

brusyl

Message Jeu 21 Juil 2011 - 14:51 par brusyl

@ duck
Vi mais lorsqu'on sera arrivé à cette prise de conscience et à ce rejet d'une société basée sur le moteur production/consommation, c'est qu'on aura au préalable réalisé comme cette société produit de l'inégalité et un paupérisme insoutenables. On aura aussi réalisé comment ce productivisme met en péril notre habitat commun, la terre.
Cela voudra donc dire qu'à ce moment l'homme sera parvenu à une conscience plus collective et solidaire : dans un monde fini, les ressources limitées seront réparties en fonction des besoins, de besoins fondamentaux.
Et puis, quand il n'y a plus de richesse, il n'y a plus de pauvreté non plus...

C'est l'inspiration de la théorie des décroissants : "vivre simplement pour que les autres puissent simplement vivre"
Je rêve ?

Revenir en haut Aller en bas

Donald11

Message Jeu 21 Juil 2011 - 9:58 par Donald11

Pour faire un don, il faut avoir les moyens de le faire. Si tout le monde désobéit a l'argent en sortant de cette société de consommation, la rivière des dons va se tarir naturellement ... Et Emmaus fermer ses portes. CQFD
C'est tout ce que j'ai ecrit

Revenir en haut Aller en bas

brusyl

Message Mer 20 Juil 2011 - 12:38 par brusyl

@ Ducky
les communautes Emmaus vivent de la recuperation de biens issus du circuit commercial classique et reinjectes dans icelui.
C'est vrai ce que tu dis, mais d'un autre côté, le fonctionnement de la communauté d'Emmaüs repose sur le don : don à l'origine puisque les marchandises vendues par elle sont cédées par leur propriétaire sans prix et don du produit de la vente ,car celui est affecté aux nécessiteux et à la réinsertion sociale, sans contrepartie. A l'inverse de ce que tu dis, ce n'est pas l'argent qui crée le processus mais l'objet.. L'argent ne joue un rôle que dans l'étape intermédiaire.

Country

Je ne connaissais pas l'histoire de ce village de Marinaleda...
Ce que tu dis sur la question de la relation de cette expérience marginale avec le reste du monde me fait penser à un livre que je viens de lire de Douglas Kennedy, son premier, "piège nuptial", un excellent thriller, qui raconte, version pessimiste, l'histoire d'un village en Australie qui s'est coupé de tout le reste de l'économie et de la civilisation en refusant la circulation de l'argent
Excellent livre, bien écrit, plein d'humour (noir) , ce genre de livre qui te fait pester le lendemain pour t'avoir fait passer une nuit blanche !
wiki en fait un bon résumé : http://fr.wikipedia.org/wiki/Pi%C3%A8ge_nuptial

Et me fait penser un peu aussi au film : "the village"
A part une coupure totale avec le reste du monde ... et donc forcément autoritaire, totalitaire ( ce que décrivent le livre et le film) , comment de telles expériences peuvent garder intacte l'utopie qui a inspiré leur création ? comment garder le lien avec le reste de la société sans perdre son âme ou se faire récupérer ?
C'est tout le problème de certaines communautés auto-gérées, dont m'a parlé ma fille aînée qui les a pas mal fréquentées. Pour ne pas se perdre, elles choisissent l'autarcie totale sans aucun contact avec l'extérieur. Et se condamnent ainsi à la marginalité alors qu'elles pourraient être témoins d'alternatives qui fonctionnent.

Revenir en haut Aller en bas

Donald11

Message Mar 19 Juil 2011 - 16:30 par Donald11

Juste une remarque anodine : les communautes Emmaus vivent de la recuperation de biens issus du circuit commercial classique et reinjectes dans icelui. Si on ferme le circuit classique, on asseche la recup en amont et Emmaus ferme boutique ! Les riches vont bien se marrer ...

J'habite dans une region, enfin quand je suis en France, ou les experiences de SEL ont fait flores un certain temps ... Avec l'age, mes capacites auditives se sont sans doute amenuisees, mais je pense qu'aujourd'hui, ca manque un peu de SEL.

Marianne serait donc devenue un repaire de rouges et de noirs ? Ca s'appelle comment, des anarcocos ou des cocoanars ?

Salut mon Ratounet.
Bises ma bellissima.

PS : on avait deja aborde le sujet des desobeissants ici ...., et ca avait fait un four !!!

Revenir en haut Aller en bas

country skinner

Message Mar 19 Juil 2011 - 10:13 par country skinner

Pour Marinaleda, exemple souvent cité de communauté autogérée dans le milieu anar, http://utoplib.blogspot.com/2010/01/marinaleda.html
A noter quelques interrogations toutefois, le même maire élu depuis une trentaine d'années, et une survie économique présentée comme autarcique mais assurée à la fois par des aides de l'Etat et surtout par la nécessité de se positionner comme vendeur concurrentiel sur le marché agroalimentaire national.
J'y étais passé dans les années 80, mais je parle mal espagnol et ils ne voulaient pas de traders mêmes anarchistes dans le village, se entiende...

Revenir en haut Aller en bas

Message  par Contenu sponsorisé

Revenir en haut Aller en bas

Revenir en haut


 
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum