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John Berger : Gauche toute

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22072009

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John Berger : Gauche toute Empty John Berger : Gauche toute




Par Didier Jacob

http://bibliobs.nouvelobs.com/20090717/13857/john-berger-gauche-toute

Le grand écrivain britannique John Berger a fait scandale lorsqu'il a partagé le Booker Prize pour son roman «G» avec les Black Panthers. Entretien.

«Le néolibéralisme, que j'appelle le fascisme économique, règne aujourd'hui sur la planète. Le monde est une prison. Ils nous mentent et ils nous volent. Il ne faut jamais croire ce que disent nos geôliers.» Né en 1926, John Berger n'a rien, on le voit, du vieux monsieur qui sucre les fraises.

Témoin le petit opuscule que cet Anglais marxiste et savoyard d'adoption vient de publier dans une minuscule maison d'édition de Montpellier, et où il analyse l'impasse économique actuelle, s'inspirant notamment du travail de Zygmunt Bauman. Mais Berger, qui pèse longtemps ses mots avant de s'exprimer en français avec un délicieux accent, est aussi un remarquable romancier -un des plus grands. Après le sublime «D'ici là», il publie un étrange livre épistolaire, correspondance entre Aïda et son amant, enfermé dans la cellule 73 de la prison imaginaire de Suse, pour faits de terrorisme. La critique féroce du capitalisme le dispute aux déclarations enflammées des amants. L'amour, la politique : c'est John Berger, en résumé.

Nouvel Observateur. - Le maître mot de votre oeuvre, c'est l'engagement ?

John Berger. - J'essaie simplement de me situer le plus au centre possible, je veux dire, au centre de l'expérience humaine. De nos jours, le centre de cette expérience, ce sont les marginaux. Marginaux qui, paradoxalement, sont les plus nombreux sur cette planète. Les sans-pouvoir comprennent les choses de la vie, quand ceux qui détiennent le pouvoir n'ont aucune idée de ce qu'est véritablement l'existence.

N. O. - Vous avez vous-même été tenté, à un moment ou à un autre, par la clandestinité ?

J. Berger. - Ca n'a jamais été jusque-là. Mais, dans les années 1950, j'ai fait partie du «Comité des 100», à Londres, qui a appelé à la désobéissance civile pour protester contre la course à l'armement nucléaire. Nous avons été surveillés, sans que cela tourne mal. Dans les années 1960, je suis allé souvent en URSS, et j'ai été assez proche d'artistes dissidents, dont j'ai pu sortir des oeuvres. En 1968, j'ai acheminé des messages pour les étudiants du Printemps de Prague. Ca ne fait pas de moi un terroriste !

Né à Londres en 1926, John Berger vit en Haute-Savoie depuis les années 1970. Scénariste (il a travaillé avec Alain Tanner), peintre, il a publié en 1967 «Un Métier idéal», un reportage, augmenté de photographies de Jean Mohr, sur la vie d’un médecin de campagne en Angleterre. Il est considéré comme l’un des plus grands écrivains vivants.

N. O. - Mais si les circonstances en avaient décidé autrement, vous auriez pu tomber dans la lutte armée ?

J. Berger. - Je n'ai rien contre la lutte armée. Si j'avais eu le courage, j'aurais pu prendre les armes. Mais comment savoir ? Il est clair que je crois dans la lutte palestinienne, et dans le mouvement zapatiste au Mexique. La lutte d'Arundhati Roy, en Inde, je la soutiens complètement. Elle est d'un courage admirable. Elle a reçu énormément de menaces. Moi, quand j'ai eu le prix pour «G», et que je l'ai partagé avec les Black Panthers, ça a fait scandale. Ce n'était pourtant pas grand-chose.

N. O. - Quand vous étiez jeune, vous aviez une âme de rebelle ?

J. Berger. - Oui, j'étais rebelle. Mais pas contre mes parents. J'aimais beaucoup ma mère. Mon père a servi comme officier dans l'infanterie britannique, dans les tranchées de 1914, pendant quatre ans. Et il a été marqué par la guerre, dont il ne parlait d'ailleurs pas beaucoup. Je l'ai beaucoup respecté pour ce qu'il avait fait. J'ai été dans un internat de 7 à 12 ans, puis dans un autre, ce qui était pour eux un sacrifice car ça coûtait assez cher, et ils n'avaient pas grand-chose. A 16 ans, je me suis échappé d'Oxford. J'étais déjà très politisé !

N. O. - Votre père a compris vos positions politiques ?

J. Berger. - Politiquement nous étions opposés. Mais on a très peu vécu ensemble. J'ai échappé aux habituels conflits familiaux grâce au pensionnat. Le prix à payer, ça a été ma solitude, mais ce n'était pas écrasant. Au contraire, je pense que ça a créé de la disponibilité pour mon imagination en tant qu'écrivain. Je n'étais pas hanté par la figure du père, et pas étouffé par la celle de ma mère.

N. O. - Comment voyez-vous la France de Sarkozy ?

J. Berger. - C'est assez terrifiant de vivre dans cette France-là. La France avec laquelle je me suis identifié au commencement était la France de Camus, de Merleau-Ponty, de Lévi-Strauss. Je suis d'accord avec Badiou, c'est le retour de Pétain. C'est un argument absolument convaincant.

Propos recueillis par Didier Jacob

«De A à X», par John Berger, traduit de l'anglais par Katya Berger Andreadakis, Editions de l'Olivier, 215 p., 19,50 euros. Du même auteur, «Dans l'entre-temps, réflexions sur le fascisme économique», Indigène Editions, 25 p., 3 euros (www.indigene-editions.fr).
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John Berger : Gauche toute :: Commentaires

country skinner

Message Ven 24 Juil 2009 - 18:00 par country skinner

Comment une idée nouvelle apparaît si ce n’est que « contre » l’ordre existant ... Proudhon était exactement ce que notre société actuelle qualifierait de marginal... Rayons d’un coup tous les marginaux : combien restera-t’il d’artistes, de philosophes, d’écrivains... personnes qui vivent avec vous, qui mangent comme vous, qui portent les mêmes habits, qui adoptent le même genre de vie et qui connaissent les mêmes nécessités ... etc...
Si, après tes posts, tu confirmes bien cette confusion sur la marginalité. Ou alors toute pensée d'opposition étant forcément marginale à son apparition, la marginalité est universelle et on la retrouve partout...
Le débat c'était quelle est la portée politique réelle (voire la contagiosité ) de gens qui décident de sortir du système économico-politique qu'ils contestent, comme le mouvement hippie par exemple (on peut avoir de la sympathie et être lucide quand même, non ?).
un marginal récupéré par la société n'est plus un marginal
Contresens majeur sur les notions de subversivité et de récupération : Les idées d'un marginal récupérées par la société peuvent rester marginales, elles ne sont plus porteuses de subversivité (subversivité politique : désagréger le pouvoir en minant son autorité - Toutes les idées sur lesquelles repose aujourd'hui la société ont été subversives avant d'être tutélaires).

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Donald11

Message Ven 24 Juil 2009 - 13:32 par Donald11

brusyl a écrit:La contestation la plus fondamentale et réussie d’un groupe de marginaux fut sans conteste celle des communautés chrétiennes face à l’empire romain
Ben, avec le recul qu'on a aujourd'hui, je me demande si on aurait pas du les exterminer à l'époque ...

« Ils habitent leur propre pays, mais comme des étrangers. Ils prennent part à tous leurs devoirs de citoyens, mais sont considérés comme des étrangers. Une terre étrangère est pour eux une patrie, et une patrie leur est terre étrangère »
Heu, tu crois que la notion de patrie existait en ces temps là ?

« Ils obéissent aux lois établies, mais par leur genre de vie ils dépassent les lois. Ils aiment tous les êtres et sont par tous persécutés. Ils ne sont pas connus et ils sont condamnés. On leur donne la mort et ils en reçoivent la vie ».
C'est pas un truc de curé, ça ? En tout cas, c'est beau comme une messe ... Mais dis-moi, d'où sortent ces "beaux textes" ? Ils sont signés par quel auteur ?

« On nous accuse d'être improductifs dans les différents secteurs d'activités. Mais comment pouvez-vous dire cela de personnes qui vivent avec vous, qui mangent comme vous, qui portent les mêmes habits, qui adoptent le même genre de vie et qui connaissent les mêmes nécessités »
Si ils font tout comme tous les autres (mais qui sont les autres ?), alors ils ne sont pas "marginal" ... sauf les improductifs ...

Non ! C'est quand même pas toi l'auteure de ces propos !!!

-au destin implacable des penseurs grecs, elle va substituer le libre arbitre et le salut personnel.
Et les années de plomb du Moyen Age ...

La religion chrétienne fut déclarée étrange et illicite (décret sénatorial de l'an 35), pernicieuse (" exitialis ", Tacite), perverse et excessive (" prava et immodica ", Pline), neuve et maléfique (" nova et malefica ", Suétone), obscure et ennemie de la lumière (" tenebrosa et lucifuga ", de l'Octavius de Minucius), détestable (" detestabilis ", Tacite).
Pour ma part, ils n'avaient pas tort, surtout pour l'obscurantisme. Elle fut l'amie des ténèbres pendant une quinzaine de siècles. Et si ça c'est un progrès des marginaux, alors, il faut ressortir la Veuve et couper la tête de tous les marginaux du monde !!!! Mais elle n'est pas la seule dans le coup. Elle est même largement dépassée par sa copine, celle prêchée par les musulmans les plus intégristes ... et leurs potes de terres saintes ... Mais c'est interdit de le dire ...

Quand même pour un incroyant, il est impossible de faire l’impasse sur la pensée chrétienne, ne serait-ce que pour comprendre le monde où nous vivons.
Ha ! bon ? Le monde chrétien travaille la conscience occidentale ? Rien de moins ?
Bon, c'est bien parce que c'est les vacances ...

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brusyl

Message Ven 24 Juil 2009 - 12:57 par brusyl

Pitit rajout à ma réflexion d’hier (que je relis avec soin pour éviter les fautes de frappe, hein my duck..)

La contestation la plus fondamentale et réussie d’un groupe de marginaux fut sans conteste celle des communautés chrétiennes face à l’empire romain

« Ils habitent leur propre pays, mais comme des étrangers. Ils prennent part à tous leurs devoirs de citoyens, mais sont considérés comme des étrangers. Une terre étrangère est pour eux une patrie, et une patrie leur est terre étrangère »
« Ils obéissent aux lois établies, mais par leur genre de vie ils dépassent les lois. Ils aiment tous les êtres et sont par tous persécutés. Ils ne sont pas connus et ils sont condamnés. On leur donne la mort et ils en reçoivent la vie ». 2 Co 10, 3
belle définition d’un marginal n’est-ce pas ?

ou encore deux siècles plus tard :
« On nous accuse d'être improductifs dans les différents secteurs d'activités. Mais comment pouvez-vous dire cela de personnes qui vivent avec vous, qui mangent comme vous, qui portent les mêmes habits, qui adoptent le même genre de vie et qui connaissent les mêmes nécessités »
« Aux yeux de la multitude, le grand tort des chrétiens était de s'isoler et de se vouloir autres : c'est une tendance habituelle que de haïr ce qui est différent de soi, et, dans une collectivité, ceux qui se mettent à l'écart « (Tertullien)


Scandale intégral que la croyance professée par ce groupe de doux dingues proclamant partout que le verbe , le logos s’est fait chair, vus comme cannibales parce que mangeant le corps du christ, incestueux parce qu’ils s’appelle entre eux frères et sœurs…
Les idées issues du christianisme vont saper les fondements de la pensée greco-romaine et les fondements politiques et religieux de l’état romain :
-tout d’abord l’idée que tous les hommes sont égaux en dignité, véritable révolution dans ces sociétés hiérarchisées ( «ces chrétiens, la lie du peuple, un ramassis d’ignorants et de femmes crédules »)
-au destin implacable des penseurs grecs, elle va substituer le libre arbitre et le salut personnel .Le culte devient privé . Faire des sacrifices publics c’est vouloir le bien de la cité en renouvelant le contrat qui la lie aux dieux. Le culte privé nie le culte impérial un des ciments de l’empire romain… .
Le culte privé, atteinte au « mos majorum » la tradition ancestrale constitue de plus une menace pour l’unité sociale de l’empire
On ne peut imaginer combien ce message fut considéré comme explosif , radical : c’était rompre la légitimité de la domination, dissoudre le sacré, disloquer la tradition, miner les cultures….

La religion chrétienne fut déclarée étrange et illicite (décret sénatorial de l'an 35), pernicieuse (" exitialis ", Tacite), perverse et excessive (" prava et immodica ", Pline), neuve et maléfique (" nova et malefica ", Suétone), obscure et ennemie de la lumière (" tenebrosa et lucifuga ", de l'Octavius de Minucius), détestable (" detestabilis ", Tacite).


Quand même pour un incroyant, il est impossible de faire l’impasse sur la pensée chrétienne, ne serait-ce que pour comprendre le monde où nous vivons.
Cette subversion évangélique initiale n’a jamais cessé depuis de travailler la conscience occidentale et pas seulement des chrétiens déclarés…au travers de ses affirmations de la liberté de l’homme, de son égalité et de son universalité
C’est Max Weber qui le constate : « les exigences a-cosmiques du Sermon sur la Montagne, sous la forme d’une pure éthique de la conviction, ainsi que le droit naturel chrétien compris comme une exigence absolue fondée sur cette doctrine, ont conservé leur puissance révolutionnaire et ils sont chaque fois revenus à la surface avec toute leur fureur dans presque toutes les périodes de bouleversements sociaux »
Mais je m’égare là…..

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Donald11

Message Jeu 23 Juil 2009 - 22:40 par Donald11

brusyl a écrit:Ou, deuxième acceptation possible, ...
Tu veux parler d'acception, ou sens particulier, ou je me trompe ?

celui qui par une démarche consciente et réfléchie choisit de ne pas adhérer au système , celui qui vit sa différence à la marge de la société, ni tout à fait en dehors , ni tout à fait en dehors…
Il y a deux dehors, et rien en dedant !!!

Rayons d’un coup tous les marginaux : combien restera-t’il d’artistes, de philosophes, d’écrivains ?. Comment « penser autrement » est-il possible sans une révolte contre l’endoctrinement de son milieu et un affrontement à l’opposition de la « majorité silencieuse » et à l’hostilité des institutions ?
Je suis d'accord avec toi. Einstein est certainement un bel exemple de marginal.

Durkheim considérait ainsi la marginalité comme un facteur positif du changement social, une innovation « une anticipation, un acheminement vers ce qui sera »
Tu veux parler de Charlotte de ... Très bien, je sors ....

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brusyl

Message Jeu 23 Juil 2009 - 19:52 par brusyl

que de confusion et d'amalgames à travers la notion de contestation, entre marginalité (le système ne me conveint pas, je vis en dehors selon des règles autres) et opposition passive (je dis non), dissidence légaliste (j'ai un projet différent et je fais de la propagande) ou activisme (la force au service d'un projet révolutionnaire)

Attends deux petites secondes country avant de dire que je mélange tout et n’importe quoi…

L’important est sans doute de s’entendre sur la notion de marginalité.

Le marginal est-il un exclu ? un asocial ? un exotique ? un anomique ?, un déviant ? un rebelle ?


- Un paumé du système ? la cloche, le toxico ou le SDF du coin ?
C’est la définition médiatique du mot : celui que l’on montre pour faire peur et rassurer le bon citoyen d’avoir la « chance » de faire partie de la « normalité »
Est marginal celui (ou le groupe)qui a été mis à l’écart de la société à cause de sa différence (et ceci peut englober beaucoup de personnes : le malade, l’handicapé ou le fou, le pauvre, l’étranger, le vieux…etc mais aussi être à géométrie variable : le paysan pour l’ouvrier, l’ouvrier pour le bourgeois ) : c’est le marginal économique et social ...... le marginal passif
(sur l’évolution historique de la notion du marginal, je recommande l’excellent bouquin de Geremek : truands et misérables dans l’Europe moderne )

C'est un point acquis que nous ne parlons pas de ceux-ci d'


Ou, deuxième acceptation possible, celui qui par une démarche consciente et réfléchie choisit de ne pas adhérer au système , celui qui vit sa différence à la marge de la société, ni tout à fait en dehors , ni tout à fait en dehors…
C’est la marginalité sociologique et culturelle ou encore la marginalité active : en remettant en cause le système de valeurs de la société dont ils font partie, les individus ou groupes contestataires demeurent donc au sein de cette société sans y adhérer : ils s’y sentent étrangers et surtout sont considérés par elle comme étrangers

(Cela m’étonne d'ailleurs que toi, te réclamant d’un mouvement qui a revendiqué et revendique encore une situation marginale dans le sens où elle exprime un désir de société tout à fait nouvelle et différente, exige une rupture radicale par rapport à la norme existante et pratique la transgression considère ces groupes comme insignifiants : (Proudhon était exactement ce que notre société actuelle qualifierait de marginal …et Blanqui donc ! ! qui a passé la majorité de son existence en prison…)

Quant à révolution individuelle ou collective… c’est un faux débat : le deuxième ne pouvant se faire sans la première, ou tout au moins une prise de conscience par le plus grand nombre de l'injustice de la situation présente et de la nécessité de changement : dans cette prise de conscience, les marginaux ont joué historiquement un rôle fondamental . Sans eux , comment aurait pu s’opérer cette transformation de la perception du monde et du rapport que l’on peut avoir sur lui ? Comment une idée nouvelle apparaît si ce n’est que « contre » l’ordre existant , qui, peu à peu, va induire une modification des normes sociales et morales ?
(selon le processus , imagination,stigmatisation, acceptation, action...)

Rayons d’un coup tous les marginaux : combien restera-t’il d’artistes, de philosophes, d’écrivains ?. Comment « penser autrement » est-il possible sans une révolte contre l’endoctrinement de son milieu et un affrontement à l’opposition de la « majorité silencieuse » et à l’hostilité des institutions ?

Autre exemple.. Marx aurait-il élaboré sa théorie sans l’apport des socialistes utopistes, les Saint-Simon, Fourier, Cabet qui ont essayé d’expérimenter leur utopie de façon non violente ? (autre définition des marginaux ?)

La marge n’existe que par rapport à une norme… le rôle des marginaux est de déplacer la frontière entre norme et marge, de normaliser les marges…
Durkheim considérait ainsi la marginalité comme un facteur positif du changement social, une innovation « une anticipation, un acheminement vers ce qui sera »
Mais là où je partage ton sentiment est que depuis le phénomène hippy et jusqu’à récemment, la marginalité choisie, ces espaces de liberté se sont beaucoup réduits, comme si la normalité était devenue si exclusive qu’elle interdisait l’expression de modes de vie autres. Ceci démontre bien la violence symbolique du modèle néo-libéral.


PS 1 : un marginal récupéré par la société n'est plus un marginal...

PS 2 : je me suis située dans l'histoire disons depuis Diogène jusqu'à maintenant. Toi tu te situes dans une époque, l'actuelle, (les dirigeants actuels, la génération M6..) c'est sans doute pour cette raison que nous pensons différemment, car bien sûr de telles évolutions ne sont guère lisibles à l'échelle d'une vie

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Donald11

Message Jeu 23 Juil 2009 - 14:10 par Donald11

country skinner a écrit:Nos parlementaires viennent de voter une loi dispensant d'autorisation préalable les implantations de nouvelles petites et moyennes surfaces dites "de proximité". C'est surement un hasard mais les grands distributeurs (Carouf, Auchan, Casinon, U et consorts) en sont tout ragaillardis...
Ben oui, parce que la grande distri est derrière la plupart des petites et moyennes surfaces dites "de proximité" ...
Un exemple, l'épicier du village était un indépendant. Il allait se fournir où il voulait, quand il voulait et travaillait avec qui il voulait. Revers de la médaille, il devait assurer lui-même les approvisionnements, donc entretien d'une fourgonnette, conso de carburant, assurance, etc ... Vival a arrangé tout ça. Depuis, son épouse tient la boutique comme avant, où il apparait seulement les jours de livraison. Ils ont un jour de repos le lundi. Et le reste du temps, il s'adonne à ses passions, c'est à dire la vigne et les foires et fêtes. Résultat, la qualité des produits a baissé, et avec elle vraisemblablement le CA aussi. Mais les "pertes" sont largement compensées par les extras ... Et Casino peut refourguer sa merde au travers de petites et moyennes surfaces dites "de proximité" ...

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country skinner

Message Jeu 23 Juil 2009 - 13:07 par country skinner

Ah, la force du "non" (le plus beau mot de toutes les langues), là tu prêches un convaincu... mais que de confusion et d'amalgames à travers la notion de contestation, entre marginalité (le système ne me conveint pas, je vis en dehors selon des règles autres) et opposition passive (je dis non), dissidence légaliste (j'ai un projet différent et je fais de la propagande) ou activisme (la force au service d'un projet révolutionnaire)

Le débat si je ne me trompe était : La marginalité (concue comme sortie autonome du système avec vocation d'exemplarité et de contagiosité) a-t-elle le pouvoir de changer le système en devenant "majoritaire" ? Je suis persuadé que non pour deux raisons :

- La première, c'est que les dominants restent aux commandes économiques, politiques et financières, même minoritaires (la génération M6 sort du système elle aussi à sa manière, et pourrait bien être majoritaire, sans changer le système pour autant)

- La seconde, c'est que le système capitaliste dispose de nombreux artifices pour annihiler la portée subversive de la "contestation contagieuse".

Je les reprends pas en détail (religiosité, nationalisme, parlementarisme, consommation, distraction massive) sauf un, la récupération (qui se souvient que les cheveux longs et la fumette avaient une vocation initiale "subversive" ?) à travers un exemple tout bête et tout récent : La grande distribution porte essentiellement la vulgate néo libérale (consommer moins cher) donc je boycotte et je vais acheter chez l'arabe du coin (le système ne me convient pas donc j'en sors). Si l'exemple se généralise, ce sera la fin de la "consommation irraisonnée", pilier du neo libéralisme ? Nos parlementaires viennent de voter une loi dispensant d'autorisation préalable les implantations de nouvelles petites et moyennes surfaces dites "de proximité". C'est surement un hasard mais les grands distributeurs (Carouf, Auchan, Casinon, U et consorts) en sont tout ragaillardis...

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brusyl

Message Mer 22 Juil 2009 - 22:18 par brusyl

ah là là rien à faire pour te faire sortir du processus révolutionnaire marxiste....organisé, politisé et violent....

Et pourtant !!! ne pourrait-on pas parler de la "révolution néo-libérale" ou "révolution conservatrice" , cette idéologie qui au cours des 30 dernières années s'est imposée comme inéluctable, sans alternative possible, alors que tous, même ses initiateurs admettaient qu'elle impliquait plus d'inégalités, plus d'insécurité, plus d'injustice, plus de violence ??



En sens inverse je voudrais citer ce texte que j'ai lu sur internet
"Jusqu'ici, j'avais tendance à penser que nous n'étions, nous les citoyens ordinaires, les sans-grades, que des grains de sable, sans la moindre possibilité d'agir sur des mécanismes qui nous dépassent et nous broient. Et puis, tout à coup, comme un flash dans ma tête, je me suis souvenu qu'il y a cinquante ans, une femme noire-une domestique, je crois- avait, pour la première fois, refusé, dans un Etat du Sud des Etats-Unis, de laisser, dans son autobus, sa place qui était réservée aux blancs. Cela avait eu, à l'époque, un formidable retentissement. Et je me suis rendu compte aujourd'hui, qu'entre cet acte individuel, venu du bas du bas, et l'élection d'un Noir à la présidence des Etats-Unis, il y a peut-être un rapport de cause à effet"

Et on pourrait multiplier les exemples de ce genre...

La lutte non violente avec son arme, la passivité de résistance a contribué déclencher de nombreuses révolutions (ainsi le processus de décolonisation) Actions collectives parfois, individuelles souvent, de personnes qui ont eu le courage de dire "non" à l'injustice, à l'oppression : (je pompe ici outrageusement le livre de JF Kahn : "les rebelles : ceux et celles qui ont dit non") :

"le non de Bartolomé de Las Casas à l'esclavage, celui de Giordano Bruno à l'inquisition, d'Abélard à l'oppression scolastique, le "non" à l'intolérance de Voltaire défendant la mémoire de Calas ou celui du chevalier de La Barre, le "non " de l'abbé Grégoire à l'exclusion des juifs de la citoyenneté, de Carnot à l'Empire, de Victor Hugo à la forfaiture du 2 Décembre, d'Emile Zola à l'injustice dont fut victime le capitaine Dreyfus, de Jean Moulin à la défaite, du Général de Gaulle au déshonneur et à l'humiliation, de Mendès-France à la trahison de Guy Mollet, de Pierre-Henri Simon à la torture, des Polonais Gemerek et Michnik au totalitarisme communiste, de Dom Herder Camara à la misère des favelas brésiliennes, de Salman Rushdie à la terreur islamiste, du Juge Falcone à la mafia (...) autant de "non" constructifs qui loin de se réduire à leurs raisons suffisantes, de se grillager dans leurs refus de se couler et de s'écouler dans leur nihilisme, portaient une procession de "oui" : oui à la liberté, à la République, à la démocratie, à l'émancipation, à la justice... "

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country skinner

Message Mer 22 Juil 2009 - 20:43 par country skinner

Etre nombreux et marginaux ne signifie pas pour autant exercer une contestation efficace - surtout si on a pour but premier de se changer soi même et non le système (cf les analyses sur le pouvoir de récupération des comportements subversifs par la société du spectacle)

Mais marxiste et savoyard, c'est assez répandu dans les montagnes... Faut juste pas se perdre en montagne, sinon c'est très dur...

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brusyl

Message Mer 22 Juil 2009 - 14:45 par brusyl

cet Anglais marxiste et savoyard d'adoption
surprenant pour ne pas dire extravagant mix.....

Marginaux qui, paradoxalement, sont les plus nombreux sur cette planète. Les sans-pouvoir comprennent les choses de la vie, quand ceux qui détiennent le pouvoir n'ont aucune idée de ce qu'est véritablement l'existence
.
Tiens cela me rappelle une discussion pas très ancienne, où je défendais cette thèse de la montée en puissance des marginaux... c'est pas toi country par hasard qui me répondais que la marginalité n'avait aucun pouvoir de contestation parce que insignifiante par son nombre ?

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