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Un pays plus riche... et moins prospère

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20062011

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Un pays plus riche... et moins prospère Empty Un pays plus riche... et moins prospère








Dans l'univers très classique des économistes allemands, Hans Diefenbacher fait tache. Bien que "Professeur Docteur", cet enseignant de l'université d'Heidelberg a longtemps fait figure de marginal. Ses cheveux en bataille, son look d'éternel étudiant et le lieu pour le moins inhabituel où il reçoit ses visiteurs berlinois - l'imposante Maison de l'Eglise protestante - n'y sont pas pour rien.

De plus, Hans Diefenbacher mène depuis près de trente ans des recherches qui, jusqu'ici, intéressaient peu de monde : la création d'un indice qui mesure la prospérité du pays au-delà du produit intérieur brut. Un graphique lui sert de pièce à conviction : alors que les Allemands ne cessent de s'enrichir depuis les années 1950, c'est en 1976 qu'ils ont été les plus nombreux (62 %) à se dire satisfaits de leur situation. Depuis, ce nombre oscille entre 50 % et 60 %, selon les années.

Hans Diefenbacher fait partie des précurseurs qu'a inspirés le Club de Rome. "Si l'on démontre qu'au moins ces dernières années la croissance économique n'a pas toujours conduit à une augmentation de la prospérité, et donc de la qualité de vie des hommes, et que les coûts et profits de cette croissance sont répartis inégalement sur le territoire, cela ne doit-il pas avoir des conséquences sur la politique économique menée ?", s'interroge-t-il.

En invitant, en 2008, les Prix Nobel Amartya Sen et Joseph Stiglitz à présider une "commission sur la mesure de la performance économique et du progrès social", Nicolas Sarkozy a montré qu'il partageait ce constat et réussi un joli coup. Le Bundestag lui a emboîté le pas en créant à son tour, au début de l'année, une commission composée de responsables politiques et d'experts allemands qui doivent remettre leurs conclusions à l'été 2013.

Hans Diefenbacher a été auditionné. Son approche est à la fois plus ambitieuse et plus concrète que celle de ses homologues. Alors que la commission Stiglitz-Sen propose de créer plusieurs nouveaux indices (sur l'économie, le bien-être, le développement), Hans Diefenbacher, dans le rapport qu'il a remis en octobre 2009 au ministère de l'environnement, a conçu à partir de plusieurs variables un indice synthétique, l'indice de prospérité nationale.

A ceux qui lui reprochent de mélanger des choux et des carottes, Hans Diefenbacher fait observer que les 21 variables qu'il a retenues sont toutes monétisables et actualisables chaque année. Autre avantage : face au tout-puissant produit intérieur brut (PIB), un agrégat possède une "force communicative" infiniment supérieure à tous les indices partiels.

Ses 21 critères - certains positifs, d'autres négatifs - entrent dans trois catégories : sociale, environnementale et économique. Parmi les premiers, les écarts de revenus, la valeur du travail domestique et du bénévolat, le coût des accidents de la circulation, les dégâts causés par la criminalité, les coûts engendrés par la consommation de drogues, alcool et tabac. Parmi les deuxièmes, les dégâts causés à l'environnement, la perte de superficies agricoles, de zones humides, l'importance des énergies renouvelables. Parmi les troisièmes, la balance des paiements.

Après avoir réalisé ses calculs à l'échelle du pays en 2009, Hans Diefenbacher a dirigé une équipe de chercheurs chargés de procéder à leur première déclinaison régionale, à la demande des élus Verts du Schleswig-Holstein. Situé à la frontière avec le Danemark, le Schleswig-Holstein est un Etat-région plutôt rural. Si son produit intérieur brut était dans la moyenne nationale il y a une vingtaine d'années, il ne représente plus que 88 % de celle-ci. Le chômage n'est pas plus élevé qu'ailleurs (moins qu'à l'est), mais la population est moins qualifiée. Alors que le PIB de l'Allemagne a crû de 7,4 % de 1999 à 2008, celui du Schleswig-Holstein a stagné : + 0,2 % seulement.

Pourtant, selon les calculs d'Hans Diefenbacher et de son équipe présentés en mai, la situation est moins négative qu'il y paraît. Depuis 1998, l'index de prospérité régionale a augmenté de 9,4 %, alors qu'au niveau national il a reculé de 3,2 %. Raisons de cet écart : dans le Schleswig-Holstein, l'augmentation des revenus a certes été moins forte qu'ailleurs, mais elle a également été moins inégalitaire, la consommation d'énergie a diminué, les énergies renouvelables se sont développées plus vite que dans le reste du pays, et les coûts liés à la lutte contre la criminalité ont baissé.

"Avec cet indice, nous pouvons enfin changer les règles du jeu à partir desquelles sera jugée une bonne politique économique", s'est félicité Robert Habeck, président des Verts au Parlement régional, ravi de "pouvoir clairement faire la différence entre la bonne et la mauvaise croissance".

Au niveau national, les Verts semblent moins enthousiastes. Qu'ils n'aient pas proposé à Hans Diefenbacher de siéger à la commission du Bundestag est un signe. Mais celui-ci ne désespère pas. Plusieurs autres Etats-régions seraient intéressés par ses travaux. Et, lundi 20 juin, il est, comme Angela Merkel et Norbert Röttgen, le ministre de l'environnement, l'une des personnalités invitées à plancher devant la conférence qu'organise le Conseil pour le développement durable. Encore marginal, Hans Diefenbacher n'est plus marginalisé.

http://www.lemonde.fr/europe/article/2011/06/20/un-pays-plus-riche-et-moins-prospere_1538357_3214.html
brusyl
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