PRISONS : LES INDÉSIRABLES AUX OUBLIETTES
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23052009
PRISONS : LES INDÉSIRABLES AUX OUBLIETTES
Venue des Etats-Unis, la tolérance zéro envahit l'Europe. En France, les remparts tombent et les lois pénales pleuvent.
Les chiffres de l'enfermement s'envolent de façon spectaculaire, et la courbe croit de manière exponentielle dans tous les pays occidentaux. Le sociologue Loïc Wacquant a pointé le premier l'augmentation gigantesque des incarcérations entre 1975 et 2000 aux États-Unis. Parallèlement à cette campagne répressive, il constate dans Les Prisons de la misère (éditions Raison d'agir), chiffres à l'appui, un désengagement de l'État en matière sociale. Le budget pénal augmente proportionnellement à la baisse du budget social. Le Welfare State (l'État-providence) laisse la place à ce qu'il nomme l'État pénal.
Pour mieux contenir les désordres, l'État renforce « sa main droite » et enferme les miséreux inutiles. Wacquant va même plus loin : on les incarcère afin qu'ils intériorisent la nouvelle donne du salariat : la précarité.
Comment s'est répandue en Europe l'idéologie venue des think tanks (laboratoires à idées) américains ? Retour aux années 90 : New York aurait éliminé la délinquance... (et les pauvres). Les politiques français s'y précipitent pour constater les effets de la tolérance zéro. Après des années d'impuissance économique revendiquée, ils retrouvent enfin un champ d'action. La gauche abandonne alors sa position préventive pour se rallier à la conception punitive de la droite. On se souvient de la campagne sécuritaire de Lionel Jospin en 2002 et de ses déclarations affirmant que « la sécurité n'est ni de gauche ni de droite » mais « une valeur républicaine ».* Plus de remparts au tout répressif. Suit une cascade de lois pénales. La dernière en date, sur les peines planchers, fait déborder les prisons. La prochaine ? Nicolas Sarkozy vient d'appeler à la création d'un délit d'appartenance à une bande et à la sanction plus sévère de l'intrusion dans un établissement scolaire... Et attention au port de cagoules !
Jeunes, toxicomanes, fous, pauvres, disparaissez ! Symbole de cette évolution, les prisons au cœur des cités disparaissent au profit des prisons éloignées, perdues, comme à Rennes ou à Lyon...
On est cependant encore très loin des taux d'incarcération américains et de leurs trois millions trois cent mille prisonniers. Allez, encore un effort !
Stéphane Sinet
*LaurentMucchielli détaille très bien ce passage dans La Frénésie sécuritaire. Retour à l'ordre et nouveau contrôle social (La Découverte).
Siné hebdo du mercredi 20 mai 2009
Les chiffres de l'enfermement s'envolent de façon spectaculaire, et la courbe croit de manière exponentielle dans tous les pays occidentaux. Le sociologue Loïc Wacquant a pointé le premier l'augmentation gigantesque des incarcérations entre 1975 et 2000 aux États-Unis. Parallèlement à cette campagne répressive, il constate dans Les Prisons de la misère (éditions Raison d'agir), chiffres à l'appui, un désengagement de l'État en matière sociale. Le budget pénal augmente proportionnellement à la baisse du budget social. Le Welfare State (l'État-providence) laisse la place à ce qu'il nomme l'État pénal.
Pour mieux contenir les désordres, l'État renforce « sa main droite » et enferme les miséreux inutiles. Wacquant va même plus loin : on les incarcère afin qu'ils intériorisent la nouvelle donne du salariat : la précarité.
Comment s'est répandue en Europe l'idéologie venue des think tanks (laboratoires à idées) américains ? Retour aux années 90 : New York aurait éliminé la délinquance... (et les pauvres). Les politiques français s'y précipitent pour constater les effets de la tolérance zéro. Après des années d'impuissance économique revendiquée, ils retrouvent enfin un champ d'action. La gauche abandonne alors sa position préventive pour se rallier à la conception punitive de la droite. On se souvient de la campagne sécuritaire de Lionel Jospin en 2002 et de ses déclarations affirmant que « la sécurité n'est ni de gauche ni de droite » mais « une valeur républicaine ».* Plus de remparts au tout répressif. Suit une cascade de lois pénales. La dernière en date, sur les peines planchers, fait déborder les prisons. La prochaine ? Nicolas Sarkozy vient d'appeler à la création d'un délit d'appartenance à une bande et à la sanction plus sévère de l'intrusion dans un établissement scolaire... Et attention au port de cagoules !
Jeunes, toxicomanes, fous, pauvres, disparaissez ! Symbole de cette évolution, les prisons au cœur des cités disparaissent au profit des prisons éloignées, perdues, comme à Rennes ou à Lyon...
On est cependant encore très loin des taux d'incarcération américains et de leurs trois millions trois cent mille prisonniers. Allez, encore un effort !
Stéphane Sinet
*LaurentMucchielli détaille très bien ce passage dans La Frénésie sécuritaire. Retour à l'ordre et nouveau contrôle social (La Découverte).
Siné hebdo du mercredi 20 mai 2009
Donald11- Admin
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Age : 72
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